2011, paroisses de l'Archevêché en Grande-Bretagne

En mai 2011, le Patriarcat œcuménique avait pris la décision de retrancher les paroisses britanniques de notre Archevêché et de les intégrer dans l'Archevêché grec-orthodoxe de Grande-Bretagne (archevêché de Thyatire).

Le 13 mai 2011, le Patriarche œcuménique Bartholomée a écrit à l'Archevêque Gabriel de Comane la lettre suivante.

Bartholomée, par la miséricorde de Dieu Archevêque de Constantinople, Nouvelle Rome, et Patriarche œcuménique

No de Protocole 410

Votre Éminence Archevêque Gabriel de Comane, Exarque patriarcal du Trône œcuménique des communautés orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale, frère bien-aimé en l’Esprit Saint et concélébrant de notre humble personne, que la grâce et la paix de Dieu soient avec Votre Éminence.

Christ est ressuscité !

Votre bien-aimée Éminence n’est pas sans savoir que, par décision de l’Église Mère prise le 8 juin 2006, lors de la réunion du saint-Synode qui nous entoure, un Vicariat pour la Grande Bretagne fut créé sous votre protection pastorale, en votre qualité de notre Exarque des communautés orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale, afin de pourvoir immédiatement aux besoins pastoraux des quelques paroisses et communautés de tradition russe qu’il venait d’intégrer au Patriarcat œcuménique, à la demande de l’évêque Basile Sergievo en tête de celles-ci, élu ensuite hiérarque de notre très saint Siège apostolique et patriarcal, sous le titre du diocèse autrefois illustre d’Amphipolis, en qualité d’auxiliaire de votre Éminence.
Toutefois, l’évolution de la vie de ce Vicariat fut entravée, sous l’effet de raisons et de causes extérieures, ainsi que des décisions émanant de la justice britannique que le diocèse de Souroge – opérant sur le territoire des îles britanniques et relevant du Patriarcat de Moscou – a saisie pour revendiquer la fortune immobilière desdites communautés et paroisses. Dès lors, ayant examiné ces évolutions, le Patriarcat œcuménique a considéré que le maintien dudit Vicariat était inutile et désavantageux, non seulement pour l’Église Mère, mais aussi pour ces communautés elles-mêmes et leurs membres, réduites à l’impuissance de gérer leurs affaires. Il fut donc amené à la décision d’abolir ce Vicariat autrefois créé, et confier les communautés et paroisses restantes de celui-ci à la protection pastorale de son Éminence l’archevêque Grégoire de Thyateira et Grande Bretagne.
En annonçant à votre Éminence ces décisions de l’Église Mère pour que vous preniez des mesures en conséquence, nous portons à votre connaissance par la même occasion que, sur invitation de la part de leur président, vous pouvez participer aux Assemblées épiscopales d’Europe occidentale, établies dans les régions géographiques où vous exercez votre ministère pastoral, en application des dispositions de l’article 2 § b des décisions prises par la IVe Conférence panorthodoxe préconciliaire, ainsi que des dispositions de l’article 1 § 2 duRèglement des Assemblées épiscopales dans la Diaspora orthodoxe élaboré par ladite Conférence. À ce propos, nous vous faisons aussi connaître que votre participation àl’Assemblée épiscopale de Grande Bretagne et Irlande n’est plus requise.
Sur ce, en attendant que vous informiez l’Église Mère par un rapport sur les mesures prises en application des susdites décisions et prescriptions ecclésiastiques, nous invoquons sur vous la grâce et l’infinie miséricorde de Dieu.

Le 13 mai 2011




Le 1er juin 2011, dix-huit membres de l'Archevêché ont écrit au Conseil de l'Archevêché pour demander qu'une démarche soit entreprise, pour préserver l'intégrité de notre diocèse. Voici leur lettre.

Le 1er juin 2011


À Son Éminence
l’Archevêque Gabriel de Comane
et aux Membres du Conseil de l’Archevêché des Églises Orthodoxes Russes en Europe Occidentale
12 rue Daru
F-75008 Paris


« À toute parole, on peut opposer une parole,
mais qui pourrait nier la vie ? »
(S. Grégoire Palamas, Défense des saints hésychastes)


Éminence,
Révérends Pères,
Frères et Sœurs,

Le Christ est ressuscité !

Malgré l’accomplissement du temps joyeux de Pâques, c’est mus par un sentiment d’inquiétude que nous nous adressons à vous aujourd’hui.

En effet, nous avons appris de Grande-Bretagne que le Saint-Synode du Patriarcat œcuménique a procédé à une décision de transfert, dans la juridiction de l’Archevêché de Thyatire, des paroisses et communautés de notre Archevêché qui vivent sur les Îles Britanniques.

Nous ne nous risquerons pas à explorer le problème que pose cette décision au plan du droit ecclésiastique, car aujourd’hui aucune entité orthodoxe d’Europe occidentale ne peut se targuer d’un statut régulier, au plan du droit canon. Ceci vaut aussi pour notre Archevêché.

Tout au plus, nous soulignons qu’il nous paraît difficilement concevable de statuer d’abord, puis d’établir un cadre et des règles juridiques.

Au demeurant, il n’existe pas de code juridique qui prescrive les relations ecclésiales. L’Apôtre enseigne, en effet, que, dans l’Église, tout doit se faire « avec noblesse et dans l’ordre » (cf. 1 Co 14,40), cependant que l’ordre n’implique pas le droit. La noblesse d’âme, quant à elle, doit être le fait des membres de l’Église, quelle que soit leur fonction dans la communauté, ce indépendamment de toute disposition légale.

En revanche, comme l’ont montré plusieurs représentants éminents du renouveau théologique orthodoxe issus de notre Archevêché au XXe siècle, le droit ecclésial, lorsqu’il est appliqué sans discernement, conduit à une discipline totalitaire, car, par nature, la limite du droit est la violence, tandis que la limite de la grâce est l’amour kénotique.

Indépendamment de toute prescription juridique, l’amour et le bon sens auxquels dispose l’Évangile induisent, chez le chrétien, un respect de la personne humaine, comme l’a si souvent et magistralement enseigné Sa Sainteté le Patriarche œcuménique Bartholomée, notamment dans son dernier livre paru en français, À la rencontre du Mystère (Paris, 2011).

Le respect des personnes humaines qu’induit notre foi s’étend naturellement – et ceci nous semble capital – aux communautés que constituent ces personnes.

L’histoire de l’Église nous enseigne que la tradition canonique a gardé cette bonne disposition évangélique à travers les siècles : ainsi, lorsqu’un acte ecclésial la concernant était pris loin d’une Église, la réception de l’acte était indispensable à sa réalisation. De même, quand bien même toutes les garanties d’œcuménicité étaient-elles prises à la convocation d’un concile, celui-ci acquérait pleinement valeur dans la tradition ecclésiale uniquement après réception par le peuple de Dieu (clercs et laïcs).

L’histoire a connu bien des exemples de non-réception de décisions juridiques de portée canonique voire dogmatique, quand bien même elles pussent avoir été prises par les plus hauts représentants de la hiérarchie ecclésiastique.

Dans l’affaire qui nous occupe aujourd’hui, celle de l’appartenance ou non à notre Archevêché des paroisses et communautés qui ont choisi, en 2006, de quitter le Patriarcat de Moscou en Grande-Bretagne, il est manifeste que la décision prise par le Saint-Synode du Patriarcat œcuménique, à une date que nous ignorons, n’est pas reçue par le peuple de Dieu de notre Archevêché, ce tant au sein des paroisses et communautés de Grande-Bretagne que dans le reste de l’Archevêché. Pour les premiers concernés, c’est-à-dire les fidèles de Grande-Bretagne, qui ont vécu de rudes épreuves ces dernières années, qui commencent seulement à se relever après des années de difficultés qui paraissaient insurmontables, il est manifeste que la décision du Saint-Synode est irrecevable ; déjà, elle a provoqué désarroi et consternation. Mais pour les autres paroisses et communautés de notre Archevêché aussi, cette affaire est une épreuve : il est plus que probable que la décision ne pourra que provoquer, même après abrogation, des remous pastoraux dont nous nous serions bien passés.

Notre Archevêché, par le ministère de notre Archevêque entouré de son presbyterium, vit de manière organique, comme un corps uni. Il est impensable de considérer que des membres de ce corps puissent être retranchés sans que nous en ressentions les effets, sans que nous réagissions, avec toute la vigueur vitale d’un organisme qui subit une violence extérieure ; extérieure, car, quand bien même émise par le Saint-Synode de notre Patriarcat, notre Archevêque ou ses prédécesseurs n’ont jamais été conviés à y participer.

Ceci nous amène à un autre argument majeur contre la décision qui vient d’être prise par le Saint-Synode : la prescription synodale prise sans l’accord avec notre Archevêque entame la catholicité de notre Archevêché.

Au sein de notre Archevêché, toute paroisse, tout fidèle reconnaissent comme leur seul évêque l’Archevêque Gabriel de Comane. C’est le peuple ecclésial qui l’a élu, le 1er mai 2003, et le Saint-Synode a confirmé cette élection ecclésiale par l’élection canonique, le 3 mai suivant. Par principe, tout acte administratif dans l’Archevêché relève de la compétence exclusive de notre Archevêque. C’est lui, dans la double communion avec tous les évêques orthodoxes et tous les fidèles (clercs et laïcs) de notre Archevêché, qui est le signe de notre unité et de la catholicité de notre Archevêché.

Quelle que soit la manière dont les uns et les autres considèrent notre Archevêque, dans leur ordre protocolaire, il est et reste, pour nos paroisses et communautés, l’unique évêque, dans la plénitude du ministère épiscopal. Notre Archevêché a connu bien des aléas canoniques, depuis sa fondation en 1921, mais il est toujours resté dirigé par son évêque diocésain et lui seul. Aucune raison ne nous permettrait de transiger sur ce principe ecclésiologique.

Depuis 2006 et l’intégration des communautés britanniques au sein de notre Archevêché, une œuvre pastorale importante a été accomplie, sous l’égide de notre Archevêque. Le fruit de ce labeur : les paroisses et communautés de l’Archevêché en Grande-Bretagne ont retrouvé un semblant de paix et ont repris leur croissance. Selon nos renseignements, la présence de nos paroisses et communautés en Grande-Bretagne s’avère vraiment féconde, grâce à la communion intense de celles-ci avec le centre de notre Archevêché, grâce aux échanges paroissiaux avec les communautés et paroisses de l’Archevêché présentes dans d’autres pays.

Nous avons conscience que notre Patriarcat lui-même porte une lourde croix, dans une société turque qui ne lui est pas favorable, dans un climat de relations inter-orthodoxes où prédominent les rivalités entre patriarcats. Cependant, ce n’est pas en recevant l’irrecevable, dans un esprit de servitude, non d’obéissance, que nous témoignerons d’amour et de respect envers notre Centre patriarcal, mais en dialoguant dans la charité et la vérité.

« Car Dieu n'est pas un Dieu de désordre mais un Dieu de paix » (1 Co 14,33). Le contraire du désordre n’est donc pas l’ordre, mais la paix.

En vous assurant de notre amour et notre respect en Christ ressuscité,





Protopresbytre du Trône œcuménique Boris Bobrinskoy
Doyen honoraire de l'Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris

Archiprêtre John Breck
Professeur à l'Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris

Denys Clément
Membre du Bureau de la Fraternité Orthodoxe en Europe Occidentale
Gynécologue obstétricien des Hôpitaux de Paris

Prêtre Christophe D'Aloisio
Recteur de la paroisse de la Sainte-Trinité et des Saints-Côme-et-Damien à Bruxelles
Président de Syndesmos - la Fédération Mondiale de la Jeunesse Orthodoxe

Archiprêtre Michel Evdokimov
Recteur de la paroisse des Saints-Pierre-et-Paul à Châtenay-Malabry
Directeur du Service orthodoxe de presse (SOP)
Membre de la rédaction de la revue Contacts

André Lossky
Professeur à l'Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris

Alexis Obolensky
Marguillier de la cathédrale Saint-Nicolas à Nice
Peintre et sculpteur

Archiprêtre Michel Philippenko
Recteur de la paroisse des Saints-qui-ont-illuminé-la-Russie à Antibes
Prêtre à la cathédrale Saint-Nicolas à Nice

Jean-Claude Polet
Professeur émérite à l'Université Catholique de Louvain, Belgique
Membre de la rédaction de la revue Contacts

Archiprêtre Jean Roberti
Recteur de la paroisse Saints-Jean-de-Cronstadt-et-Nectaire-d'Égine à Rennes
Professeur de langues et littératures slaves à l'université de Rennes
Membre de la rédaction de la revue Contacts

Cyrille Sollogoub
Président de l'Action Chrétienne des Étudiants Russes - Mouvement de Jeunesse Orthodoxe
Maître de conférence au Conservatoire National des Arts et Métiers

Matthieu Sollogoub
Membre du Bureau de la Fraternité Orthodoxe en Europe Occidentale
Professeur à l'Université Pierre et Marie Curie (Paris 6) - Sorbonne Universités
Membre de l'Institut Universitaire de France

Archiprêtre Alexis Struve
Recteur de la paroisse de la Sainte-Trinité (crypte de la Cathédrale) à Paris
Président de la Commission pastorale de l'Assemblée des Évêques Orthodoxes de France

Daniel Struve
Maître de conférence à l'Université Paris Diderot
Membre de la rédaction de la revue Messager Orthodoxe

Jean Tchékan
Cofondateur et membre de la rédaction du Service orthodoxe de presse (SOP)
Assistant des universités, Enseignant à l'Institut national des langues orientales (e.r.)

Archiprêtre Vladislav Trembovelsky
Recteur de la paroisse Saint-Serge-de-Radonège à Paris

Bertrand Vergely
Maître de conférence à l'Institut de Théologie Orthodoxe Saint-Serge à Paris
Professeur de philosophie en Khâgne
Écrivain

Archiprêtre Wladimir Yagello
Recteur de la paroisse Notre-Dame du Signe à Paris
Président du Tribunal ecclésiastique de l'Archevêché



L'Archevêque Gabriel de Comane et le Conseil de l'Archevêché ont transmis cette requête au Saint-Synode du Patriarcat oecuménique qui a répondu favorablement à cette demande, par une lettre du Patriarche Bartholomée du 29 septembre 2011. Voici cette lettre.

Bartholomée, par la miséricorde de Dieu Archevêque de Constantinople, Nouvelle Rome, et Patriarche œcuménique


N° de protocole 811

Votre Éminence Archevêque Gabriel de Comane, Exarque patriarcal du Trône œcuménique des communautés orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale, frère bien-aimé en l’Esprit Saint et concélébrant de notre humble personne, que la grâce et la paix de Dieu soient avec Votre Éminence.
Suite à notre lettre patriarcale du 13 mai de cette année, n° de protocole 410, concernant la soumission des paroisses en Grande Bretagne relevant de votre Exarchat dans l’obédience de l’Archevêché de Thyateira et Grande Bretagne, nous vous faisons connaître que, ayant évalué tous les aspects de cette disposition ecclésiastique, nous avons décidé en synode de confier à nouveau à la protection canonique et la sollicitude pastorale de votre Éminence lesdites communautés, en votre qualité d’Exarque des communautés orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale.
En outre, nous portons à votre connaissance que, suite à ladite décision ecclésiastique, vous pouvez participer aussi à l’Assemblée épiscopale de Grande Bretagne et d’Irlande puisque vous y exercez un ministère pastoral en application des dispositions de l’article 2 § b des décisions prises à la IVeConférence panorthodoxe préconciliaire ainsi que celles de l’article 1 § c du Règlement des Assemblées épiscopales dans la Diaspora orthodoxe élaboré par ladite Conférence, à l’invitation de son président, Son Éminence l’Archevêque Grégoire de Thyateira et de Grande Bretagne, que nous avons informé par écrit.
En annonçant ces décisions à votre Éminence pour la suite à donner, nous invoquons sur vous la grâce et l’infinie miséricorde de Dieu.

Le 29 septembre 2011


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