L’histoire de
l’Archevêché remonte au 8 avril 1921,
lorsque le Patriarche Tikhon avec l’assentiment du Métropolite Benjamin de
Petrograd (l’Église les a canonisés tous deux), confie à l’Archevêque et
bientôt Métropolite Euloge (Georgievsky), l’administration des paroisses russes
d’Europe Occidentale.
Après quelques années de
vie ecclésiale en Europe de l’Ouest, en cette période particulièrement trouble
de l'histoire, le Métropolite Euloge est interdit de célébration par le
Métropolite Serge (Stragorodski), qui exerce alors l’autorité dans l’Église de
Russie, en l’absence de Patriarche de Moscou. Le Métropolite Euloge est démis
de ses fonctions en raison de sa participation, à Londres, à une réunion de
prière pour les chrétiens persécutés en Russie. Soutenu par ses évêques
auxiliaires et l’ensemble de l’Archevêché, il demande alors sa réception dans
le Patriarcat œcuménique de Constantinople. Par le Tome patriarcal et synodal
du 17 février 1931, le Patriarcat
œcuménique reçoit l'Archevêché au titre d'Exarchat temporaire auto-administré
de tradition russe, aux côtés de son Archidiocèse-Exarchat grec d'Europe
occidentale (fondé en 1922, avec siège à Londres, sous l'autorité épiscopale de
l'Archevêque de Thyatire et de Grande-Bretagne).
Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, le Patriarcat de Moscou
cherche à profiter de la vague de patriotisme soviétique qui a suivi la
victoire pour récupérer l'Archevêché, mais la tentative échoue: le Métropolite
Euloge, usé par les années et malade, veut rejoindre le Patriarcat de Moscou
qui lui certifie que le Patriarcat œcuménique est d'accord avec cette démarche
(ce qui s'est avéré être un mensonge), mais n’est pas suivi par le diocèse et
décède sans avoir reçu le congé de Constantinople. Les successeurs du
Métropolite Euloge (qui a dirigé l'Archevêché de 1921 à 1946) maintiennent le
cap fixé par leur prédécesseur: le Métropolite Vladimir Tikhonicky (1946-1959),
l'Archevêque Georges Tarassoff (1960-1981), l'Archevêque Georges Wagner
(1981-1993), l'Archevêque Serge Konovalov (1993-2003) et l'Archevêque Gabriel
De Vylder (2003-2013) ont tous respecté le lien de l'Archevêché avec le
Patriarcat œcuménique.
Au début
des années 1960, le Patriarcat œcuménique
initie des rencontres historiques: pour la première fois depuis longtemps
(voire pour la première fois), des délégués de toutes les Églises orthodoxes
patriarcales, autocéphales et autonomes se réunissent avec un mandat officiel
de leurs autorités synodales. Ils amorcent un dialogue sur l'organisation de
l'Église orthodoxe et la nécessité de convoquer un concile général de
l'Orthodoxie. Le rythme des conférences panorthodoxes s'accélère, si bien qu'en
novembre 1965, les espoirs de coordination du processus panorthodoxe amènent le
Patriarcat œcuménique à abroger le Tome de 1931, l 'Église de Russie
voulant à nouveau reprendre l'Archevêché dans son Patriarcat.
L'évêque dirigeant de l'Archevêché occupe alors,
dans le Patriarcat œcuménique, le second rang dans l'ordre de préséance des
évêques diocésains hors de Turquie, après celui d'Amérique et avant celui
d'Australie (tandis que les archevêques-exarques postérieurs au Tome de 1999
occupent le dernier rang dans cet ordre de préséance).
De
novembre 1965 à janvier 1971, l 'Archevêché continue à dépendre sacramentellement du
Patriarcat œcuménique (les concélébrations liturgiques ne cessent pas avec les
évêques du Patriarcat œcuménique, et le clergé de l'Archevêché continue de
commémorer le Patriarche œcuménique dans les célébrations), mais l'Archevêché
se trouve dans une situation d'indépendance administrative par rapport à toute
autre Église patriarcale ou autocéphale.
Pendant cette période de quelque cinq années, les
autorités pastorales de l'Archevêché demandent régulièrement à l'Église de
Constantinople de rétablir le lien administratif et hiérarchique avec le
Patriarcat œcuménique.
Entretemps, les relations entre le Patriarcat œcuménique
et le Patriarcat de Moscou s'enveniment, notamment lorsque, en date du 10 avril 1970 et contrairement à la
position exprimée par le Patriarcat œcuménique à ce sujet, l'Église de Moscou
proclame l'autocéphalie de l'Église orthodoxe en Amérique, dont l'histoire et
les traditions sont proches de celles de l'Archevêché de la rue Daru.
Moins d'un an plus tard, par décision synodale du 22 janvier 1971, le Patriarcat œcuménique
qualifie l'abolition de l'Exarchat effectuée en novembre 1965 de
"suppression temporaire" qui avait pour objectif "d'assurer la
concorde indispensable à la collaboration panorthodoxe et à la convocation du
Saint et Grand Concile" (cf. lettre du 22 janvier 1971 du Patriarche œcuménique
Athénagoras à l'Archevêque Georges Tarassoff).
Pendant la période qui va de 1971 à 1999, l 'Archevêché vit selon un statut canonique
particulier: reconnu dans son unité et dans sa spécificité administrative et
liturgique, il existe toutefois uniquement comme assemblage de vicariats de
tradition russe dans les diocèses en Europe occidentale (métropoles
grecques-orthodoxes); l'Archevêque de la rue Daru se trouve en position
canonique de subordination vis-à-vis des métropolites d'Europe occidentale (au
niveau de la discipline canonique, il se doit de commémorer leur nom, après
celui du Patriarche, lorsqu'il célèbre sur le territoire de leur pays). Avec
les fractionnements successifs des diocèses du Patriarcat oecuménique en Europe
occidentale (les métropoles grecques-orthodoxes étaient au nombre de 4 en 1965,
6 en 1971, 7 en 1991), la stabilité juridictionnelle de l'Archevêché n'était
plus tout à fait garantie: l'Archevêché, pourtant uni moralement (et au plan
juridique), était canoniquement fractionné en 7 parts, de tailles diverses,
lors de l'élection de l'Archevêque Serge (1993).
Par un
Tome patriarcal et synodal de juin 1999, sur demande de l'Archevêque Serge, le Patriarcat œcuménique accorde
à l'Archevêché le statut canonique d'Exarchat, en stipulant notamment:
"Cet Archevêché (...) constitue un organisme ecclésial unifié, dépendant
canoniquement et de manière immédiate du Trône œcuménique (...). L’Archevêque
qui est à la tête de l’Exarchat patriarcal possède la juridiction prévue par
les divins et saints canons sur toutes les communautés de l’Exarchat et est
habilité à donner des congés canoniques, à accueillir, à nommer et à autoriser
à une diaconie ecclésiastique tout clerc ou laïc soumis à sa juridiction".
Officiellement, le statut canonique de l'Archevêché
demeure celui-là jusqu'à aujourd'hui.
En résumé:
- 1921: fondation de l'Archevêché par le Patriarcat
de Moscou
- 1922: fondation de l'Archidiocèse de Thyatire et
d'Europe occidentale et centrale du Patriarcat œcuménique
- 1931: réception de l'Archevêché dans le
Patriarcat œcuménique de Constantinople
- 1945: tentative majeure de récupération de
l'Archevêché par le Patriarcat de Moscou
- 1961: première conférence panorthodoxe à Rhodes
- 1962: deuxième conférence panorthodoxe à Rhodes
- 1963: fractionnement de l'Archidiocèse de
Thyatire et d'Europe occidentale et centrale du Patriarcat œcuménique en quatre
diocèses (métropoles grecques-orthodoxes)
- 1964: troisième conférence panorthodoxe à Rhodes
- 1965: suspension provisoire du lien administratif
entre l'Archevêché et le Patriarcat œcuménique, par abolition du statut
d'Exarchat
- 1970: attribution par le Patriarcat de Moscou de
l'autocéphalie de l'Église orthodoxe en Amérique, non reconnue par le
Patriarcat œcuménique
- 1971: restauration du lien administratif entre
l'Archevêché et le Patriarcat œcuménique par assimilation des paroisses de l'Archevêché
dans les diocèses d'Europe occidentale (Métropoles grecques-orthodoxes,
principalement la Métropole de France)
- 1999: nouveau statut d'Exarchat accordé à
l'Archevêché par Tome Patriarcal et Synodal
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